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Faits de Société

Vivre dans les clous de la bienpensance pour paraître parfaitement correct. 

 

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            « Les secondes, les minutes, les heures tournent

Les siècles, les années, les mois s’écoulent

Emportant, dans la mort, bien des générations.

Renouvellement du temps et, dans ce temps,

N’émergera jamais la sagesse des hommes. »

  AD

     Un édit du 03 juillet 1315 du Roi Louis X, le Hutin, (1289/1316), proclame que quiconque pose le pied sur le sol de France est affranchi. S’il peut prétendre aux mêmes droits que le peuple, le demandeur est soumis aux mêmes devoirs. Nous retrouvons la trace de cet édit au XVIIème siècle.

            Montesquieu (1689/1755) considère que le droit du sol est une absurdité qui consiste à dire qu’un cheval est une vache parce qu’il est né dans une étable (c’est dans l’Esprit des Lois)

Il avait, déjà, une vision sur notre perte d’identité.

            Un nouvel édit, mais de tolérance, est formulé en espérant ramener le calme. Cet édit énonce le respect de la foi religieuse et l’établissement de la paix entre les catholiques et protestants. (Charles IX et Catherine de Médicis – janvier 1562)

            En 1778, suite à une décision royale, les Noirs sont interdits de séjour en France. Tout mariage mixte est déclaré illégal. Un dépôt est créé à Brest pour les expédier dans les Caraïbes où l’on manque de main d’oeuvre. Certains Noirs, présents à Saint Malo, sont arrivés avec des navires corsaires ou de commerces et il est difficile de faire admettre aux Capitaines de ces bateaux de remettre leurs matelots de couleur aux autorités.

            Fin décembre 2019, une association bordelaise demande que l’on retire les plaques des rues et des squares de la cité girondine dont les noms rappellent l’esclavage. Il faut rebaptiser ces endroits pour ne pas retenir ces monstruosités.  Combien de villes devront suivre cette initiative ?

Bordeaux :  vingt et une rues et places ; Nantes : huit seulement alors que la ville fut la plus active ; Marseille : cinq ; La Rochelle : un square, alors qu’elle fut la première à armer pour le commerce triangulaire ; Le Havre, Saint Malo et bien d’autres ports de moindre envergure.

            Cette énumération chiffrée ne peut être exhaustive.

            Deux cents ans déjà que mes aïeux ont peut-être trainé leurs braies à bord de l’« Emilie », du « Créole » et d’autres navires de Robert Surcouf, de Postel, ces Malouins, ou de Dutertre, le Lorientais. Ils ont navigué entre les Mascareignes et les Seychelles pour gagner Zanzibar, ce dépôt de bois d’ébène géré par les Arabes, puis entre Malé aux Maldives et les côtes birmanes pour courir après les bateaux de la perfide Albion.

            Dois-je me sentir coupable de ces manières de gérer leurs vies ?  Non.

Qu’aurais-je fait durant cette époque ?  Aurais-je été corsaire, pirate ou marin de la Royale ; je n’en sais rien et je m’en fous.

            Ce sont les Portugais, au XVème siècle qui ont ouvert la voie sur la traite négrière entre l’Afrique et leurs territoires en manque de main d’oeuvre. (Sao Tomé et les Açores). Le Pape Nicolas V (1397/1455), élu en 1447, justifie cette servitude pour combattre les Sarrasins, les païens et tous les autres ennemis du Christ. Cette bulle est supprimée par tous les autres Papes qui déclarent l’esclavage comme un grand crime.

            Lors des découvertes de nouvelles terres par Christophe Colomb, les Espagnols voulurent asservir les « Indiens » mais, devant la résistance de ce peuple, ils sont partis faire leur marché auprès des Rois nègres.

            Aucun européen ne se risqua sur le sol africain pour aller se servir.

            Les Très Catholiques Rois ibériques ont été rappelés à l’ordre par le Pape Paul III dans sa lettre du 2 juin 1537 qui prône que ces êtres sont des humains et ont le droit à la liberté, à la propriété et confirme le 9 juin l’interdiction de mettre en esclavage tous les autres peuples qui peuvent être, plus tard, découverts.

            Cela n’eut aucun effet. Les Anglais ont mis toutes voiles dehors pour ce commerce lucratif puis les Hollandais. Les Français et les autres états européens ont suivi quelques années plus tard.

L’appât du gain…

            Lors du Siècle des Lumières, nos Grands Hommes combattent ces faits mais sans grande conviction. Avaient-ils des parts dans ce commerce ? Montesquieu se demande pourquoi Dieu a mis une âme dans un cœur tout noir et qu’il est impossible que nous supposions que ces gens-là soient des humains.

            Voltaire (1694/1778) :  nous n’achetons des esclaves domestiques que chez les nègres ; on nous reproche ce commerce. Un peuple qui trafique de ses enfants est encore plus condamnable que les acheteurs (Essais sur les mœurs et l’esprit des nations).

             Diderot (1713/1784) : quoiqu’en général les nègres aient peu d’esprit, ils ne manquent pas de sentiments. (L’encyclopédie)

            René de Chateaubriand (1768/1848) oublie que son père a redoré son blason et sa fortune puis acheté le château de Combourg en armant plusieurs navires négriers (Amaranthe, Saint René, Jean Baptiste…), que son oncle Pierre était le capitaine du Roi de Juda…

            Devons-nous renier et faire disparaître de nos bibliothèques tous leurs ouvrages ?

            Suis-je coupable ? Non ! Dois-je me sentir concerné par une quelconque repentance ? Non ! Ai-je une trace de ce passé ancestral sur mon casier judiciaire ? Non ! Suis-je digne d’être Franc Maçon ? Oui : Mes Frères me reconnaissent comme tels. Alors quoi ?

            Certains veulent absolument que nous soyons fautifs du comportement de nos ancêtres.

            Ras le bol d’entendre, une nouvelle fois, ce vouloir d’imposer la « repentance ». Je n’ai pas besoin que l’on me susurre cela en continuité et ce, pour satisfaire l’égo de quelques personnages qui ont de l’audience auprès des médias et aussi de ces nations qui ne sont pas sans reproche.

            En 1792, la Convention a bien tenté d’abolir la traite et l’esclavage. Pour cause de défense du territoire, pour cause des rebellions des Vendéens et des Bretons, nos élus ont eu, en priorité, la sauvegarde de leurs politiques. Louis XVI avait contresigné cette loi. Son humanisme n’a pas empêché que l’on lui coupât la tête le 21 janvier 1793.

            Olympe de Gouge assure que ses écrits n’ont d’autres intérêts que de rappeler les hommes aux principes bienfaisants de la Nature.

            Sans toutefois demander une abolition totale de ce marché, Olympe veut adoucir le sort des esclaves. Elle condamne l’extrémiste politique en France et dans les colonies. Ses prises de positions ne sont pas très bien perçues par ces extrémistes. Elle monte à l’échafaud le 3 novembre 1793. Elle a quarante-cinq ans.

            Liberté, Ô liberté, disait madame Rolland, que de crime on commet en ton nom !  Elle suivit son amie Olympe de Gouge quelques jours plus tard.

Le 4 février 1794, la Convention proclame officiellement l’abolition de l’esclavage.

Le 4 mai 1802, Bonaparte, 1er Consul, abroge cette décision.

La période (1794/1802) n’a, en rien, fait cesser le trafic triangulaire du commerce maritime. (Europe/Afrique/Amérique/Europe). Il fallait de la main d’oeuvre pour les terres aux Caraïbes et aux Mascareignes

Article premier – l’esclavage sera maintenu conformément aux lois et règlements antérieurs à 1789.

Article 2 – La traite des Noirs et leur importation dans lesdites colonies auront lieu conformément aux lois et règlements existant avant cette époque de 1789

        Parmi les armateurs et capitaines négriers, il y eut de nombreux Francs-Maçons. Le plus populaire auquel je me suis attaché est Robert Surcouf, né à Saint Malo le 12 décembre 1773, mort dans la même cité le 8 juillet 1827. Il fut initié le 22 mai 1796 à la Loge « La Triple Espérance » à l’Ile Maurice. Lors de son retour définitif en France, il s’affilia à la Loge « La Triple Essence » à Saint Malo.

            Il y eut de nombreuses tentatives d’abolition de ce commerce inhumain. La Royauté, la Convention, la République, le consulat et l’Empire firent des lois et des décrets. Un certain laxisme empêcha l’arrêt total. Des autorisations furent même accordées pour fournir une main d’oeuvre aux colons.

            Le 27 avril 1848, Victor Schoelcher (1804/1893) fait adopter le décret sur l’abolition de l’esclavage.

            Cette période douloureuse n’est pas seulement française, mais nous ne pouvons pas la rejeter. Elle fait partie de notre Histoire avec un grand H. Je suis pour la faire connaître afin que chacun de nous puisse en débattre en toute sérénité pour qu’il n’y ait plus cette ignominie mondiale.

            Aujourd’hui, certains font exactement l’inverse. Ils combattent avec hargne cette période en créant ainsi la polémique.

            Aujourd’hui, il faut faire attention aux mots que l’on emploie. Dans sa dernière planche évoquant la liberté, un Frère se demande « s’il n’y a pas de la lâcheté à se complaire dans un conformisme de non-choix ».

            Aujourd’hui, doit-on se mettre au garde à vous et se regarder le nombril en étant satisfait de notre laisser faire ?

            Nous sommes Francs-Maçons, nous ne devons débattre, dans nos Obédiences, ni de politique partisane, ni de religion, mais le sujet sur lequel je vous interpelle ne me semble pas être contraire à cette obligation ?

            Il est des sujets pour lesquels il ne faut pas se voiler la face. Nous devons nous ouvrir et porter vers l’extérieur ce que nos travaux ont apporté de positif. Et ce n’est pas en restant muets sur les colonnes que nous connaitrons le chemin qui nous semble juste.

A chacun d’apporter sa pierre à l’édifice, non pas pour convaincre mais pour amener à la réflexion.

A chacun d’en tirer ses conclusions.

Aujourd’hui, je suis MOI avec mes qualités et mes défauts mais je suis MOI et à 77 ans et plus, je ne pense pas avoir une fois dérogé à la ligne de conduite que JE me suis fixée.

Parfait, être sans tâche, le suis-je ? Non, évidemment, je ne le suis pas. Mais, qui peut dire qui il est vraiment, même parmi nous ?

Je ne veux donner de leçons à personne ; je ne veux en recevoir de quiconque ne pouvant pas m’expliquer pourquoi je suis dans l’erreur.

Je suis à l’écoute et je veux juste, que l’on m’écoute.

Est-ce trop demander ?

Que devient ce devoir, d’être « Nous-Même » ?

Aujourd’hui, en avons-nous seulement le droit ?

 

Frère Alain D .·.

(Année 2020)

Une réponse à Repentance

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